Madame C. est propriétaire d’un appartement qu’elle a donné à bail à Monsieur U.
Madame C. a été informée des nuisances causées par le locataire à nombre de ses voisins.
De nombreux voisins se sont en effet plaints des comportements bruyants du locataire, de jour comme de nuit (cris, pleurs, rires, coups dans les murs), ainsi que de jets d’objets par les fenêtres et des jets d’urine contre la façade, de mauvaises odeurs provenant de son logement, des incivilités récurrentes dues à un état d’ivresse quasi-permanent engendrant un climat d’insécurité dans l’immeuble, des altercations avec des occupants ayant nécessité l’intervention de la police, des comportements exhibitionnistes devant l’immeuble, etc.
Malgré des tentatives d’intervention amiable de Madame C. auprès de son locataire, et la dénonciation des faits au Procureur de la République, Monsieur U. ne cessait pas ses comportements inappropriés.
La situation devenait de plus en plus insoutenable pour les occupants de l’immeuble, et de nombreux résidents ont d'ailleurs déménagé compte tenu des nuisances insupportables causées par Monsieur U.
C’est ainsi que nous avons été contraints de saisir le Juge des contentieux et de la protection d’une demande de résiliation judiciaire du bail et d’expulsion de Monsieur U., sur le fondement des dispositions de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 et du Code civil.
Aux termes de l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 : « Le locataire est obligé […] d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location ».
En vertu de l’article 6-1 de la loi du 6 juillet 1989, « Après mise en demeure dûment motivée, les propriétaires des locaux à usage d'habitation doivent, sauf motif légitime, utiliser les droits dont ils disposent en propre afin de faire cesser les troubles de voisinage causés à des tiers par les personnes qui occupent ces locaux. »
En vertu de l’article 1224 du Code civil : « La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. »
L’article 1227 du Code civil dispose que « la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice. »
Monsieur U. s’est opposé à la demande de résiliation du bail en considérant que ses comportements ne sauraient être qualifiés de troubles anormaux du voisinage qui altèrent la tranquillité et la jouissance paisibles des autres occupants de la résidence, mais qu’ils constitueraient de simples « inconvénients inhérents » à l’occupation d’un immeuble collectif.
Afin de soutenir notre demande de résiliation du bail et d’expulsion, nous avons rappelé que les juridictions sanctionnent habituellement de tels comportements.
La Cour d’appel de PARIS a notamment considéré par un arrêt du 15 décembre 2016 que « le comportement bruyant, dangereux et violent de M. F. trouble continuellement la tranquillité et la jouissance paisible des autres locataires de la résidence », était précisé que celui-ci « frappe aux portes de ses voisins, notamment le soir ou la nuit, pour leur demander de l’argent ou des cigarettes, circule à moitié dévêtu dans l’immeuble, fume dans les parties communes de la résidence » et que son comportement ne cessait pas malgré les avertissements qui lui ont été prodigués (CA PARIS, Pôle 4 Chambre 3, 15 décembre 2016, n° 14/21300).
Nous nous sommes également fondés sur l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, selon lequel le locataire est également tenu :
« c) De répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement ;
d) De prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d'Etat. »
Par ailleurs, selon l’article 1729 du Code civil, « Si le preneur n'use pas de la chose louée raisonnablement ou emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail. »
En l’occurrence, la police a constaté lors d’une intervention au domicile de Monsieur U. que « le sol était couvert de bouteilles vides. Le coin cuisine est insalubre, la plaque de cuisson était recouverte de graisses. Sur la table, se trouvaient des bougies allumées au milieu de détritus ».
Il était donc également établi que Monsieur U. n’était pas apte à maintenir son logement dans un bon état d’entretien, comme le lui impose pourtant l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, mais également qu’en laissant des bougies allumées au milieu de détritus, qui risquent d’enflammer ces détritus et le feu de se propager à la pièce, puis à l’immeuble entier, il adopte des comportements à risque.
Le Juge des contentieux et de la protection a pris la mesure de la gravité de la situation, et a fait droit à nos demandes de résiliation du bail et d’expulsion du locataire.
Dans son jugement, il a relevé que « dans le but de démontrer que Monsieur U. se rend responsable de nuisances diverses et qu’ainsi il manque à son obligation de jouissance paisible, Madame C. produit aux débats » des pièces suffisantes permettant d’établir les nuisances sonores, les nuisances olfactives, l’agressivité, les violences physiques et verbales et les altercations avec des résidents de l’immeuble, les dégradations ou encombrements des parties communes, l’exhibitionnisme et enfin l’obstruction d’une canalisation.
Le Juge ajoute que ni les mises en demeure, ni les interventions de la police, ni le courrier recommandé avec accusé de réception envoyé par mes soins à Monsieur U. n’ont permis de mettre fin à ces comportements.
Dès lors, il a considéré qu’ « il est établi de manière suffisamment nette que Monsieur U. se rend responsable de multiples nuisances pour les autres occupants » et que « ces nuisances multiples excèdent très nettement le trouble normal que doit s’attendre à subir toute personne résidant en collectivité ».
Enfin, il a jugé que « Monsieur U. a manqué de manière à la fois grave et répétée à son obligation de jouissance paisible de son logement, justifiant qu’il soit mis fin au contrat de bail à ses torts exclusifs » que son expulsion soit ordonnée.
Cette décision est particulièrement satisfaisante pour l’ensemble des occupants de l’immeuble qui pourront retrouver leur tranquillité dès le départ de Monsieur U., mais également pour Madame C. qui était susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard des autres occupants de l’immeuble du fait des nuisances causées par son locataire.
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