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Séparation des parents : quid de l’autorité parentale et des liens entre l’enfant et ses parents ?

Photo du rédacteur: Noémie RozaneNoémie Rozane

Après une séparation, notamment lorsque les ex-conjoints sont parents d'enfants, des questions pratiques se posent de manière immédiate en ce qui concerne l'exercice de l'autorité parentale, la résidence des enfants, le maintien des relations entre parents et enfants, etc.


Qui exerce l'autorité parentale ?


L’article 373-2 du Code civil pose le principe selon lequel la séparation des parents est sans incidence sur les règles de dévolution de l’exercice de l’autorité parentale.


Ainsi l’autorité parentale est exercée conjointement par les parents, même séparés.


La Cour de cassation a rappelé en effet que l'exercice en commun de l'autorité parentale par les deux parents, même séparés, est le principe et que l'exercice unilatéral est l'exception, fondée sur l'existence de motifs graves, souverainement appréciée par les juges du fond (Cass, 1ère civ, 20 février 2007, n° 06-14643).


L’article 373-2-1 prévoit toutefois une exception : « Si l'intérêt de l'enfant le commande, le juge peut confier l'exercice de l'autorité parentale à l'un des deux parents ».


Le juge doit ainsi impérativement rechercher, de manière concrète, compte tenu des circonstances, quel est l’intérêt de l’enfant (Cass, 1ère civ, 13 octobre 1993, n° 92-10700).


Quelques exemples :


- Le parent qui n'en fait qu'à sa tête peut-il être privé de l'exercice de l'autorité parentale ?


Le juge a confié à la mère l’exercice de l’autorité parentale sur ses deux enfants, compte tenu du comportement du père, qui avait pris « la décision unilatérale du père de garder son fils auprès de lui au mépris d'une décision de justice exécutoire a entraîné la séparation des deux enfants très attachés l'un à l'autre ainsi qu'une rupture radicale de chacun des enfants avec l'autre parent ».

Le juge a considéré que « la détermination du père à imposer sa propre loi est une source d'angoisse pour les enfants et permet de douter de ses capacités à appréhender les besoins essentiels des enfants dont l'intérêt est de normaliser, malgré la séparation, des relations avec chacun des parents dans le strict respect de la loi et des décisions de justice » (Cass, 1ère civ, 17 janvier 2006, n° 03-14421).


- L’incarcération du père justifie-t-elle de confier à la mère l’exercice de l’autorité parentale ?


La Cour d’appel de Colmar a pu décider que « la détention ne suffit pas, à elle seule, à démontrer que le parent concerné n'est pas en mesure d'exercer l'autorité parentale, compte tenu des possibilités qui lui sont offertes de communiquer avec l'extérieur notamment par courrier, téléphone ou par l'intermédiaire du conseiller de probation. » (CA Colmar, 10 février 2015, n° 13/02548)


Mais selon la Cour d’appel de Bourges, « l'incarcération du père est de nature à rendre objectivement difficile l'exercice en commun de l'autorité parentale entre les parents, alors que cet exercice en commun nécessite la prise de nombreuses décisions qui ne peuvent souffrir les délais d'une communication distante et surveillée telle que celle qui existe en milieu carcéral ; en outre, l'enfant avait été profondément perturbé à la suite des actes que son père avait reconnu avoir commis (meurtre de son épouse) ; c'est dans l'intérêt de l'enfant qu'il convient de confier l'exercice de l'autorité parentale à la mère exclusivement. » (CA Bourges, 16 janvier 2004, 13/00287)


- L’interdiction faite au père d’entrer en contact avec ses enfants et leur mère justifie-t-elle de confier à la mère l’exercice de l’autorité parentale ?


La Cour d’appel de Besançon a jugé que « la mise en examen du père et son placement sous contrôle judiciaire avec notamment l'interdiction d'entrer en contact de quelque manière que ce soit avec son ex-épouse et ses deux enfants, rend impossible un exercice conjoint de l'autorité parentale et justifie le transfert de l'exercice de l'autorité parentale à la seule mère. » (CA Besançon, 7 juillet 2016, n° 15/00487)


- Le désintérêt d’un parent justifie-t-il de confier l’exercice exclusif de l’autorité parental à l’autre parent ?

La Cour d’appel de Paris a répondu par la négative, suite à la demande d’une mère d’un enfant de un an tendant à se voir confier l’exercice exclusif de l’autorité parentale, qui invoquait le désintérêt du père lequel s’était expatrié en Biélorussie et qui avait initié une procédure de contestation de paternité (CA Paris, 21 janvier 2014, n° 13/00420).


- Le déplacement illicite d’un enfant par un parent justifie-t-il de confier à l’autre parent l’exercice exclusif de l’autorité parentale ?


Selon la Cour de cassation, « doit être privé de l'exercice de l'autorité parentale sur ses deux enfants, au profit de leur mère, le père qui, au motif qu'il les avait envoyés au Mali sans l'accord de leur mère, sans que celle-ci ne connaisse leur adresse exacte, les enfants vivant donc loin de leurs deux parents et de leur petite sœur, et donc sans exécuter les décisions de la justice française qui lui enjoignaient de les ramener. » (Cass, 1ère civ, 14 mai 2014, n° 13-15521)


Qu'en est-il du maintien des liens entre parents et enfants ?


En pratique, après une séparation va se poser la question du lieu où vont résider les enfants.


Les enfants vont ainsi résider de manière alternée chez l'un et l'autre de leurs parents, ou au domicile de l'un des deux parents.


Dans ce dernier, cas, l'autre parent doit pouvoir maintenir des relations avec ses enfants et les accueillir dans le cadre d'un droit de visite et d'hébergement.


La loi pose en effet le principe selon lequel « chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l’enfant et respecter les liens de celui-ci avec l’autre parent. » (article 373-2 du Code civil)


Ainsi, le parent qui exerce conjointement l’autorité parentale, ne peut se voir refuser le droit de maintenir des relations personnelles avec l’enfant que pour des motifs graves tenant à l’intérêt de celui-ci.


Ainsi, là encore, le juge doit caractériser la gravité de la situation à laquelle l’enfant est exposé pour priver un parent de maintenir des relations avec son enfant (Cass, 1ère civ, 28 mai 2015, n° 14-16511).


Par exemple, l'intérêt des enfants peut justifier la suppression d'un droit de visite et d'hébergement d'un parent, notamment lorsque les enfants manifestaient un mal-être certain à l'approche de ces rencontres, étaient perturbées dans leur travail scolaire, l'angoisse ressentie par l'un d'eux se traduisant par des crises d'eczéma (Cass, 1ère civ, 15 avril 2015, n° 14-15369).


Dans une autre affaire, la Cour de cassation a approuvé la Cour d'appel d'avoir suspendu tout droit de visite et d'hébergement, ainsi que tout lien régulier via les moyens de télécommunication : dans cette affaire, une enquête sociale avait été réalisée, afin que le juge puisse avoir des informations sur l’environnement dans lequel évoluait l’enfant, tant au domicile de sa mère qu’au domicile de son père.


L’enquête sociale avait mis en évidence que le père s'était vu refuser l'accès à la salle de prière de sa commune à la suite de discours préoccupants auprès de jeunes et pouvait, selon plusieurs témoins, adopter un comportement menaçant.


Par ailleurs, l'intéressé tenait à son fils des propos particulièrement dénigrants envers sa mère, allant jusqu'à lui refuser sa qualité de mère, ce qui suscitait chez l'enfant un comportement agressif à l'égard de celle-ci.


La Cour de cassation a ainsi considéré que la cour d'appel avait caractérisé les motifs graves tenant à l'intérêt de l’enfant et justifiant la suspension du droit de visite et d'hébergement du père ainsi que le rejet de la demande de communication régulière de celui-ci avec l'enfant, par téléphone ou par « skype ». (Cass, 1ère civ, 10 février 2021, n° 19-21902)



 
 

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